
Les cadres sont des agents possédant une formation juridique technique, administrative, financière ou commerciale et exerçant, par délégation de l’employeur, un commandement sur les collaborateurs de toute nature: ouvriers, employés, techniciens, collaborateurs commerciaux, agents de maîtrise et ingénieurs. La formation ne résulte pas forcément d’études sanctionnées par un diplôme, elle peut résulter d’une expérience professionnelle, car la possession d’un diplôme n’est pas indispensable si la formation équivalente a pu être acquise par l’expérience.
La loi 65/99 formant code du travail utilise, pour la première fois, le terme de « cadre », pour désigner une catégorie de salariés investis, par délégation de l’employeur, d’un pouvoir de commandement et qui exercent des responsabilités au sein de l’entreprise. Avant, ils faisaient partie, selon le décret du 23 octobre 1947, de la catégorie : « Agents de maîtrise, Ingénieurs et directeurs », aujourd’hui, cette catégorie a pour nom : « cadres et assimilés ». Ainsi, l’article 14 du code stipule que le personnel d’une entreprise est classé, en matière de période d’assai, en trois catégories : ouvriers, employés et cadres et assimilés. En matière de représentation du personnel les salariés sont classés selon l’article 437 en deux collèges : les ouvriers et employés d’une part, et les cadres et assimilés d’autre part. Enfin, les cadres et assimilés sont, en matière de préavis, placés au même rang que les dirigeants et les agents d’administration, ils bénéficient de la période la plus importante.
Comment sont classés les cadres ?
Les cadres sont classés, d’une manière générale, en trois catégories :
Cadres débutants ; Cadres confirmés ; Cadres supérieurs et dirigeants.
Il faut savoir qu’il ne suffit pas de se faire attribuer, par le contrat de travail, la qualité de « cadre », il est nécessaire que l’intéressé exerce réellement des fonctions impliquant responsabilité et délégation d’une partie de l’autorité du chef d’entreprise.
A l’inverse, les tribunaux reconnaissent la qualité de « cadre » au salarié qui est investi, par délégation de l’autorité de l’employeur, d’un pouvoir de commandement sur le personnel de l’entreprise qu’il dirige en prenant des initiatives et des responsabilités, même lorsque le contrat de travail ne fait pas mention de la qualité de « cadre ».
Un contrat écrit est souhaitable :
Conformément aux dispositions de l’article 15 du code du travail, il n’est pas nécessaire que l’embauche d’un salarié, même cadre, soit constatée par un écrit, cependant, il est vivement recommandé aux deux parties de procéder à un écrit concrétisant l’embauche et, dans ce cas, les signatures devront être légalisées par les services compétents.
Un des intérêts de l’écrit réside dans le fait que les parties peuvent y prévoir des clauses importantes ayant pour objet de stipuler certaines dispositions qui ne sont pas prévues par le droit commun du travail.
Certaines clauses ont pour but de protéger les intérêts de l’employeur, telles que la clause de non-concurrence, la clause d’exclusivité, la clause de fidélité, la clause de dédit formation, la clause de mobilité, la clause de confidentialité, etc…, D’autres clauses ont pour but de protéger les intérêts du salarié cadre, telles que la clause de stabilité d’emploi, la clause relative aux inventions et créations, ou la clause de l’indemnité conventionnelle en cas de cessation du contrat de travail à l’initiative de l’employeur etc…
Liberté d’aménager le temps de travail
Les cadres non dirigeants sont des salariés comme les autres, la durée légale maximale de travail et le respect des horaires leur sont applicables, mais les tribunaux reconnaissent généralement aux cadres une certaine liberté quant à l’aménagement de leur temps de travail personnel compte tenu de leurs attributions et leurs responsabilités. A l’exception des cadres dirigeants et des cadres bénéficiant d’un salaire forfaitaire comprenant les dépassements d’horaire résultant des impératifs de la fonction exercée, les cadres ont, en principe, droit au paiement des heures supplémentaires.
Des pouvoirs peuvent leur être délégués
La délégation de pouvoirs consiste à ce que le chef d’entreprise transfère une partie de ses pouvoirs, à l’un ou plusieurs de ses collaborateurs cadres. Il s’agit, en fait, de rendre ces cadres directement responsables du respect d’un certain nombre de dispositions légales et réglementaires, ces dispositions concernent généralement l’hygiène, la sécurité, les conditions de travail, la gestion du personnel, la représentation de l’entreprise au sein des différents comités et commissions prévus par le code de travail etc …
Une rémunération comprenant plusieurs éléments
Les cadres bénéficient, en général, d’une rémunération fixe (salaire de base), et d’un certain nombre d’avantages en espèces (indemnité de représentation et autres), avantages en nature (voiture de fonction, logement de fonction et autres), et avantages liés à la protection sociale (super couverture sociale en matière de retraite).
Ils peuvent, en outre, bénéficier d’une rémunération variable sous forme de participation aux résultats, intéressement facultatif ou acquisition d’action (stock options).
En vertu de l’article 55 du code du travail, tous ces éléments de rémunération entrent en ligne de compte pour le calcul de l’indemnité légale de licenciement, sur la base des sommes perçues pendant les 52 dernières semaines, à l’exception de certaines indemnités prévues à l’article 57.
Les dommages-intérêts prévus par l’article 41 du code, en réparation d’une résiliation abusive du contrat de travail, sont fixés par les tribunaux sur la même base.
Quels motifs pour licencier un cadre
Perte de confiance, mésentente, comportement personnel préjudiciable, objectifs non atteints sont autant de motifs de licenciement particuliers à des salariés ayant des attributions et des responsabilités au sein de l’entreprise.
Les tribunaux ont toujours refusé de considérer la perte de confiance comme motif valable de licenciement tant que celle-ci ne se traduit pas, dans les faits, par un acte concret ayant causé un préjudice certain à l’employeur. Il en résulte que le licenciement pour perte de confiance ne peut reposer sur de simples soupçons ou craintes de l’employeur, mais sur des éléments objectifs permettant de prouver l’attitude du cadre. Le licenciement d’un chef de service de comptabilité surendetté ne peut légitimement être fondé sur le risque de détournement de fonds, car, pour légitimer le licenciement il faut que le comportement du cadre soit suffisamment précis et significatif pour constituer un élément objectif. De toute façon, il appartient aux juges de s’assurer, d’abord de la présence d’éléments objectifs et si ceux-ci justifient ou non le licenciement.
La mésentente est la manifestation d’une dégradation de la relation de travail. Comme la perte de confiance, elle n’est pas en soi un motif de licenciement si elle ne repose pas sur des éléments objectifs et suffisamment graves pour perturber le bon fonctionnement de l’entreprise. La mésentente résulte souvent de divergences de vues avec l’employeur sur les méthodes de travail, lesquelles divergences peuvent, si elles persistent au point de perturber le bon fonctionnement de l’entreprise, légitimer le licenciement du cadre.
Concernant le comportement personnel du cadre, la Cour de cassation a, dans un récent arrêt, considéré comme justifié le licenciement d’un directeur d’agence bancaire, ayant remis à titre personnel à un client de la banque un chèque sans provision.
La Cour de cassation a, en effet, estimé que le comportement du cadre est nuisible au crédit de son employeur.
Préavis : une durée minimum selon l’ancienneté
Le code fixe une durée minimum de préavis réservée aux « cadres et assimilés », elle est fixée selon les catégories des salariés par voie réglementaire. Selon le décret n° 2-04-469 du 29 décembre 2004, elle est d’un mois pour une ancienneté de moins d’un an, et de 2 mois pour une ancienneté de 1 à 5 ans, et de 3 mois pour une ancienneté de plus de 5 ans.
Les principales règles du préavis telles qu’elles sont prévues par le code peuvent être résumées comme suit :
– le préavis n’est exigible que lorsque les parties sont liées par un cdi (Contrat à durée indéterminée), et en l’absence de faute grave et de force majeure.
– La durée légale ou conventionnelle du préavis n’est qu’un minimum, rien ne s’oppose à ce qu’employeur et cadre conviennent de la prolonger.
– L’employeur peut dispenser le cadre d’effectuer son travail pendant le temps du préavis, mais en lui maintenant l’intégralité de la rémunération à laquelle il aurait pu prétendre s’il avait travaillé.
– Le point de départ du préavis est le jour de la notification de la lettre annonçant la rupture du contrat de travail, peu importe que le destinataire ne veuille pas ou ne puisse pas en prendre immédiatement connaissance.
– Lorsqu’un cadre est victime d’un accident de travail ou atteint d’une maladie professionnelle au cours de la période du préavis, celui-ci est interrompu pendant une durée égale à celle de l’incapacité temporaire.
– L’employeur est tenu d’accorder au cadre licencié un temps d’absence pour la recherche de travail.
Pour le décompte de l’ancienneté, les tribunaux prennent en compte l’ancienneté totale du cadre, même celle où celui-ci n’occupait que le poste de simple employé avant de devenir cadre.
Calcul de l’indemnité légale de licenciement
En l’absence d’une clause prévoyant une indemnité contractuelle de licenciement supérieure à celle prévue par la loi, le cadre, comme tous les salariés, bénéficie, en vertu de l’article 52 du code du travail, d’une indemnité dite « légale » de licenciement équivalente au salaire de 96 heures par année pendant la 1ère tranche de 5 années, 144 pendant la 2ème tranche de 5 années, 192 pendant la 3ème tranche de 5 années, et 240 au-delà de 15 années de service.
En vertu de l’article 76 du code du travail, cette indemnité est exonérée d’IGR.
Calcul de l’indemnité contractuelle de licenciement
En vertu de l’article 52-3, le contrat de travail, ou la convention collective, peut prévoir une indemnité de licenciement supérieure à celle prévue par le code de travail, elle est payée par l’employeur ou sur décision judiciaire dans les mêmes conditions prévues pour l’indemnité légale.
Elle est exonérée d’IGR dans la limite du montant fixé pour l’indemnité légale.
Quelle différence entre un cadre supérieur et un directeur général ?
La qualité de cadre supérieur est normalement subordonnée à une double condition:
– Avoir reçu la formation nécessaire pour exercer une fonction de responsabilité, cette formation peut être constatée par des diplômes appropriés ou acquise par une longue expérience professionnelle.
– Exercer par délégation de l’employeur un commandement sur des collaborateurs ou des fonctions exigeant la mise en oeuvre d’une technicité laissant à l’intéressé une marge d’initiative et de responsabilité.
Un cadre d’entreprise peut recevoir le mandat de directeur général, il est alors désigné par le conseil d’administration sur proposition de son président, son mandat s’éteint en même temps que celui du président, il dispose à l’égard des tiers des mêmes pouvoirs que le président notamment pour ester en justice. Afin de sauvegarder le respect du principe de la révocabilité de son mandat, il faut que le cumul des fonctions mandataire et salarié cadre d’entreprise soit effectif. Les fonctions salariées doivent être réelles et distinctes véritablement de celles de mandataire social, continuer à être exercées et à faire l’objet de rémunération séparée.
Les modalités de rémunération doivent correspondre à la dualité alléguée de fonctions, chacune d’entre elles doit faire l’objet de rémunération propre et les fonctions salariées doivent faire l’objet d’une rémunération correspondant à la tâche accomplie.
Le mandat social, s’il n’est pas gratuit, fait l’objet d’une rémunération distincte.
Le directeur général muni d’un mandat social et d’un contrat de travail, bénéficie de la protection prévue par la législation du travail en faveur des salariés.
Cette protection prendra fin dès que l’intéressé aura atteint l’âge de retraite.
La Vie éco du 27 Décembre 2013

M'HAMED EL FEKKAK
Avocat